En janvier, je m’étais dit que cela ne serait pas mal du tout si j’arrivais à publier chaque mois une chronique sur mon blog. J’étais motivé par ce nouveau challenge littéraire avec pour objectif, 12 textes en archive à la fin de l’année. Dans les starting-blocks, j’étais prêt à me lancer tête baissée sur cette piste d’obstacles avec la rage de vaincre ! Je me souviens encore des quelques idées de sujet que j’avais en tête et plus les semaines passaient, plus j’en avais des nouvelles que je notais fébrilement sur mon calepin. Ah oui, j’étais prêt ! Gonflé à bloc pour… au final trébucher au premier obstacle venu et ne plus rien entreprendre. Entre-temps, la motivation a pris la poudre d’escampette et le challenge s’est dégonflé comme un ballon de baudruche. Arrivant doucement aux portes de l’été, je n’eus qu’une seule pauvre chronique pleurnicharde, datant de janvier, qui se plaignit de se sentir si seule pour l’année 2020.
Du temps depuis le début de l’année, j’en ai eu surtout durant la période de confinement. Ah ça oui, deux mois où je pouvais écrire, lire et me lancer à corps perdu dans des expériences artistiques inédites. Si je le souhaitais, je pouvais me diriger vers de nouvelles voies jamais tentées, jamais éprouvées dans le passé. Étant dans l’obligation de rester chez moi, cloîtré entre quatre murs, je pouvais solliciter mon imagination tout entière sans être dérangé. Quel pied de ne pas subir au quotidien la charge écrasante du rôle de parent ; quel bonheur de ne pas supporter la présence de membres de la famille qui nous exaspère ; quelle chance de ne pas travailler au contact du public. En somme, devant moi un sacré boulevard ! Si ce n’était pas une belle occasion pour me lancer dans un nouveau challenge, je ne sais pas ce qu’il m’aurait fallu !
Peut-être que la procrastination et des allers-retours entre mon bureau et la cuisine ont eu raison de moi ? Pourtant, j’ai tenté une expérience artistique inédite : laisser une page blanche ouverte sur l’écran de mon ordinateur durant la journée. Chaque matin, j’ouvrais le traitement de texte puis le soir, je le refermais sans y enregistrer aucun mot : une surface vide, un espace resté immaculé (pas conception puisque certes, sans tache mais sans l’action de concevoir un texte). Et moi devinez ce que je faisais pendant les journées ? Je me goinfrais de trois repas et d’un goûter entre quelques grignotages devant ma tablette à me gaver de films et de séries. Tout le monde avait été rassasié : corps et esprit. Et puis franchement, l’envie d’écrire des chroniques sur le confinement, je n’en ressentais ni le besoin, ni la force de m’exprimer sur un sujet dont je pensais n’avoir rien à dire.
Pourtant, je me rappelle avoir rédigé le poème suivant dans les quinze premiers jours du confinement comme une sorte de pense-bête, de recommandation pour mon esprit :
Parcourir un article dans la presse
expliquant qu’il faut s’imposer
un emploi du temps pour la journée ;
s’obliger à définir
un temps
pour la lecture,
pour l’exercice physique,
pour regarder un film,
pour se reposer,
pour cogiter,
pour s’envoyer en l’air ?
Sourire quand le journaliste rapporte
que le repos est important
et ne pas se dire que c’est open bar
toute la journée dans le frigo ;
début de soirée,
ne pas être oppressé par le temps,
doucement il s’égraine
sans se faire remarquer ;
le soleil se couche,
la fraîcheur de la nuit
se pose sur mes épaules,
me dire que peut-être,
c’est une opportunité,
ce confinement,
une chance pour démarrer
un projet en littérature ;
au vu de la situation,
me dire que la période
de confinement de quinze jours
va être prolongée,
c’est inévitable ;
je bois une rasade de vin
en laissant échapper
mon esprit loin d’ici,
mon corps restant sur le balcon.
Conclusion de mes expériences artistiques inédites, je n’ai pas suivi toutes les indications citées dans le poème. D’autre part, je n’ai pas vu le temps filer à force de procrastiner. Ensuite, je n’ai jamais vu autant de séries et de films en un laps de temps si court et enfin, j’ai pris six kilos en deux mois. Toutefois, j’ai réussi à vous refourguer le sujet du confinement dans cette chronique.
Eh bien la petite chronique pleurnicharde de janvier va se sentir moins seule maintenant.