Crid’Art à Amnéville : une page culturelle qui se tourne définitivement
L’espace Culturel Crid’Art présent depuis six ans au centre de loisirs d’Amnéville tire sa révérence dès le 11 janvier prochain. Une belle initiative privée qui n’aura pas pu perdurer en raison du manque de soutien des politiques, d’une situation financière précaire et d’un ras le bol de son fondateur, Bernard Staudt. Il n’empêche, il a d’ores et déjà des projets pour la version Crid’Art à Metz et son Expo Center à Amnéville.
Amoureux de l’art contemporain, Bernard Staudt a eu la brillante idée d’implanter un espace culturel au beau milieu d’un centre de loisirs à Amnéville. Entre le Casino, les cinémas, un centre thermal, des restaurants et de nombreuses structures de distraction pour le public, Crid’Art a ouvert ses portes en 2002. Au bout de six ans d’activité, après que 150 000 visiteurs ont franchi le seuil de la porte de Crid’Art pour contempler les œuvres de 150 artistes régionaux, nationaux ou internationaux, le fondateur de la galerie jette l’éponge : « Nous arrêtons Crid’Art car nous ne correspondons pas à la demande du public dans un site tel que Amnéville », indique-t-il en précisant, mine de rien : « dans la zone, il n’y a pas d’acheteurs d’art ! »
En plus de présenter régulièrement de nouvelles expositions temporaires au public, Crid’Art vendait les œuvres comme une galerie, mais possédait en plus la particularité de proposer aux scolaires des visites pédagogiques et ludiques gratuites pour comprendre l’art contemporain. C’est ainsi que 300m² étaient dédiés à la peinture et à la sculpture avec des artistes exposant toute l’année. Un centre dynamique et ouvert 363 jours par an, d’environ 1000m², géré par une petite équipe qui voulait en quelque sorte démocratiser la culture en compagnie d’artistes talentueux venus d’horizons divers. « Les visiteurs contemplaient des œuvres issues d’un véritable savoir-faire », explique Bernard Staudt ; et de détailler ses propos : « Pour moi, le véritable art est celui qui est réalisé avec talent des propres mains de l’artiste, dont la niaque jaillit de son ventre. Pas quelque chose d’abstrait et d’incompréhensible. »
Aucune subvention publique n’a été allouée pour aider à pérenniser la structure, seuls deux sponsors, depuis le début de l’aventure, apportent leur soutien: le Casino et le centre Thermal. Il faut dire que Bernard Staudt ne souhaitait pas de la part des institutions publiques un quelconque financement. Juste un soutien moral et une reconnaissance pour le travail accompli depuis six ans. Malheureusement, il a rapidement déchanté : « J’ai compris que l’art est le pré carré des politiques et des fonctionnaires. Il ne faut surtout pas y toucher quitte à écœurer le public », insiste le patron de l’espace culturel. « La culture n’est pas destinée au privé, cela doit rester au public et d’ailleurs il n’y a qu’en France que nous voyons cela », signale Bernard Staudt.
Un autre point au sujet duquel il ne décolère pas : l’attitude de la classe politique depuis l’annonce de la fermeture de Crid’Art dans les médias. Il s’insurge face à leur silence : « Que je ferme ou non, j’ai l’impression qu’ils s’en fichent royalement ! En revanche, pour le public, c’est différent », confie-t-il ; il ne comprend toujours pas qu’on puisse laisser la structure fermer. « Chaque jour, nous recevons des courriers ou des mails de soutien et d’encouragement. » Le déclic qui a poussé Bernard Staudt à tout arrêter s’est produit lors de la visite inopinée d’un local sur Metz à quatre minutes du centre Pompidou-Metz. « Depuis juin 2007, ma situation financière devenait tendue. Devant m’acquitter d’une taxe professionnelle prohibitive, et sans revenus propres, j’avais de quoi tenir un an mais pas davantage », raconte-t-il. « Je ne voulais pas m’endetter jusqu’au cou ! » Ainsi, Crid’Art déménage sur Metz dès la fin avril pour devenir une simple galerie d’art. Quant au local d’Amnéville, il va être transformé en un centre d’exposition plus « people », comme tient à préciser son concepteur, avec un nom dépourvu de la moindre ambigüité : « Expo Center ».
Malicieux, Bernard Staudt annonce pêle-mêle quelques futurs événements : « Il y aura une exposition sur les Ferrari de course depuis 1955, mais également sur l’Art ménager de l’entre-deux guerres, et aussi sur les animaux empaillés. » Il avoue que « cela ne touche pas le même public mais qu’au moins cela sera plus populaire et plus en adéquation avec le centre de loisirs d’’Amnéville ». L’ouverture est prévue le 9 avril 2009. Ainsi une page se tourne sur Amnéville. Pour celles et ceux qui souhaitent encore voir l’exposition en cours du peintre Harald Wolff, il leur reste encore trois jours. Après, une nouvelle histoire commencera.
Article publié le 8 janvier 2009 dans le bimédia lorrain La Plume Culturelle.
Photo : ©LPC|JML – Une page se tourne à Amnéville. Crid’Art ferme ses portes et s’intalle sur Metz comme simple galerie.