« Frac Forever » au Centre Pompidou-Metz
En 1982 sous l’impulsion de Jack Lang, les Fonds régionaux d’Art Contemporain (FRAC) étaient créés aux quatre coins de France. L’objectif étant d’acheter des œuvres aux artistes pour ensuite exposer leur travail au public. Le Centre Pompidou-Metz a voulu rendre hommage au Frac Lorraine en lui permettant d’investir la galerie 3 jusqu’au 25 février 2013 pour présenter 200 œuvres de sa propre collection photographique. La déambulation qui se fera dans l’obscurité réserve quelques surprises et surprend par son originalité.
Galerie 3 du Centre Pompidou-Metz : la chaleur humaine et celle du chauffage vous enveloppent dès votre entrée dans la salle. Vous n’y voyez rien. L’obscurité est totale. Une sensation de frustration vous envahit, vous oppresse. Pourtant, telles des lucioles, un ballet de petites lumières illumine des pans de murs où les œuvres accrochées attendent d’être découvertes par les visiteurs. Eh oui, pour partir à la conquête visuelle de la nouvelle exposition du Centre Pompidou-Metz, « Frac Forever », il vous faudra être muni d’une lampe-torche (fournie par la structure culturelle) afin de pouvoir découvrir les 200 photographies, provenant de la collection du Frac Lorraine, d’une soixantaine d’artistes majeurs de ces quarante dernières années.
« Frac Forever »… dans le noir !
Le concept a de quoi surprendre. Déambuler dans l’obscurité à travers 1 000 m², voilà une idée originale. Il faut dire que le Centre Pompidou-Metz a laissé carte blanche à Béatrice Josse, la directrice du Frac Lorraine, et que dans ce domaine-là, celle-ci n’est jamais à court d’inspiration. Une belle initiative pour rendre hommage à la création, il y a trente ans, des FRAC en France. La galerie s’apparenterait donc à une chambre noire où la lampe-torche servirait de révélateur pour mettre les œuvres en lumière. Pourquoi pas ! « Il y a une volonté, par l’obscurité, d’instaurer une intimité entre les visiteurs et les œuvres », explique Hélène Guenin, responsable du pôle programmation du Centre Pompidou-Metz. Et d’insister sur ce désir de casser la monotonie des hauteurs par un accrochage hors normes : « Nous voulions sortir de ce mode de consommation qui consiste à avaler les murs et les œuvres sans réellement comprendre le sens du travail de l’artiste. » Une initiative qui demande au public un réel effort intellectuel en l’obligeant à sortir des sentiers battus.
L’exposition est organisée en six thématiques : « Nuits et songes », « Nuées et nuages », « Wonder woman », « Extension du domaine de l’intime », « Futur antérieur » et enfin « Arbre à vie ». Des thèmes qui de la part des artistes livrent leurs points de vue et inspirations au sujet de l’espace-temps, de la nature, de l’espace humain, tout autant que sur l’individualité, la société, l’identité, les lieux de vie, la vie, le vieillissement, la maladie et la mort. Et, cerise sur le gâteau, vous pourrez lire sur les murs – toujours à l’aide de votre lampe-torche – un lettrage qui reprend un fragment de conversation entre Marco Goinho et Béatrice Josse entre 2011 et 2012. Une sorte de poème incomplet où l’entretien emporte le visiteur dans les méandres croisés de leurs imaginaires. Vous l’aurez compris, il n’y a pas de parcours imposé, c’est une liberté totale qui est laissée à la déambulation. Terminée la hiérarchisation du travail des artistes. Hélène Guenin conclut : « Pour cette exposition, on renverse la tendance. On regarde d’abord l’image puis on lit les explications. » Le but étant de partager des émotions intenses avec l’œuvre et finalement de faire confiance à ses intuitions.
Autour de « Frac Forever », les visites complices…
Chaque dimanche à partir du 30 septembre 2012 et jusqu’au 24 février 2013, à 10h30 et à 17h00, le public pourra être reçu chez deux « complices ». Ceux-ci proposent de recevoir, soit chez eux, soit dans un lieu public, une dizaine de personnes afin de partager avec elles et d’imaginer un récit sur une œuvre de l’exposition qui les aura particulièrement touchées. Comment un chef de gare, un médecin, un technicien, un journaliste, un pompier ou un sidérurgiste par exemple, issus de milieux divers, peuvent-ils percevoir une photographie ? Qu’ont-ils ressenti ou pensé sur le sujet ? Ils partageront ainsi par leurs mots leur aventure intime avec des inconnus, dans une expérience insolite pour tout le monde. Comme quoi l’originalité est une notion que le FRAC Lorraine sait entretenir depuis ses débuts et cela, nous nous en lassons jamais.
Article publié le 27 septembre 2012 dans le bimédia lorrain La Plume Culturelle.
Photo : ©LPC|DR – Exposition Frac Forever au Centre Pompidou-Metz. Portrait de Natalia LL en 1972.