Inconnu à cette adresse, la lecture spectacle de la compagnie Les uns, Les unes
La Compagnie Les Uns Les Unes propose une lecture théâtralisée d’après la nouvelle épistolaire de Kressmann Taylor, Inconnu à cette adresse, pour sensibiliser collégiens, lycéens et adultes à la lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Un spectacle suivi d’un débat pour concerner et rendre vigilants les citoyens de maintenant et ceux de demain.
Pour sensibiliser le public scolaire au racisme, la Compagnie théâtrale Les Uns, Les Unes, a décidé de mettre en scène, sous la houlette de Daniel Proia, l’ouvrage de Kressmann Taylor, sous forme d’une lecture-spectacle suivie d’un débat entre les artistes et les spectateurs. Deux comédiens de talent, Pascal Philippon et Roland Marcuola abordent le sujet délicat du nazisme, de l’antisémitisme et du totalitarisme d’une façon originale et vivante. « Notre spectacle est orienté vers les collégiens, à partir de la troisième, et les lycéens », explique Roland Marcuola, le fondateur de la troupe. « Pour comprendre le sujet et le récit, une étude préalable en classe est indispensable, et nous organisons des rencontres avec les professeurs bien en amont de notre intervention, de façon à préparer les jeunes à appréhender le sujet dans son contexte historique, » précise-t-il. Et de conclure : « Ensuite, la conversation s’engage avec les élèves, sur le fond comme sur la forme, afin que dans le débat la parole se libère. Une vraie approche, une vraie réflexion sur la démocratie d’aujourd’hui. »
Intervenant jusque-là dans le milieu scolaire de la région thionvilloise, la compagnie Les Uns, Les Unes tente la pédagogie avec les adultes et leur propose des représentations publiques pour leur permettre de découvrir la profondeur du sujet. Le public pourra rencontrer la troupe à la médiathèque de Florange le 11 avril, le 23 mai à la bibliothèque de Serémange-Erzange ou le 19 juin à la salle du Palace à Hayange (10 euros pour les adultes, 7 pour les enfants). « Notre souci est de marquer le lien et le parallèle avec ce qui se passe aujourd’hui, dans le monde mais également en France, bien que nous ne soyons évidemment pas dans un pays fasciste », indique Roland Marcuola, qui ajoute : « Nous voulons faire prendre conscience que la bête n’est pas morte, et que peut-être la démocratie est plus fragile qu’on le croit. Et le combat est peut-être plus urgent qu’il n’y paraît ».
La mise en scène, minimaliste, du spectacle ajoute au texte lu une dimension supplémentaire intense. Le public peut ainsi découvrir de lui-même et de façon évidente le comportement du correspondant allemand, d’abord résigné, puis favorable à l’ascension d’un régime basé sur la haine. « L’histoire est un éternel recommencement. Il faut rester éveillé et vigilant face au danger », signale le comédien. « Il y a eu la Shoah, mais aujourd’hui aussi les guerres entre ethnies en Yougoslavie et au Rwanda, et plus proches de chez nous, les expulsions manu militari d’immigrés en situation irrégulière. Même si on ne retrouve pas la brutalité policière des nazis, insiste Roland Marcuola, il y a tout de même, avec ces lois d’exception qui sont votées, des similarités qui doivent, en tant que citoyens, nous alerter ». Si la lecture-spectacle Inconnu à cette adresse instaure pour un élève, futur citoyen, des conditions propices à la réflexion et l’interrogation, elle permet aux adultes de se remémorer l’importance de leurs devoirs et droits civiques.
La nouvelle épistolaire Inconnu à cette adresse a été écrite par Kressmann Taylor et publiée pour la première fois en 1938 dans Story Magazine. Elle retrace la correspondance amicale et fraternelle entre deux amis et associés dans le commerce des tableaux d’arts. L’un, d’origine allemande, Martin Schulse, retourne en Allemagne pendant que l’autre, un Juif américain, Max Eisenstein, reste aux États-Unis. A travers les courriers des deux protagonistes, dont les échanges épistolaires se situent entre 1932 et 1934, la montée du nazisme et ses conséquences sur toute une nation se révèlent et deviennent évidentes, tandis que les relations fraternelles des deux personnages apportent au récit une dimension psychologique. Publié sous la forme d’opuscule, l’ouvrage deviendra un best-seller et sera réédité de nombreuses fois à travers le monde.
Article publié le 5 avril 2008 dans le bimédia lorrain La Plume Culturelle.
Photo : © LPC|Les Uns, les unes – Pascal Philippon et Roland Marcuola.