La Plume Culturelle

Les gale­ries « Octave Cowbell » et « Castel Coucou » au diapa­son avec l’ar­tiste Skall

Sculp­teur, perfor­meur et vidéaste, l’ar­tiste Skall présente quelques-unes de ses œuvres jusqu’au 26 novembre prochain dans la gale­rie messine « Octave Cowbell » et chez « Castel Coucou » située à Forbach. Le public trou­vera dans la première struc­ture un travail mini­ma­liste avec des sculp­tures et des photos issues de perfor­mances passées. Quant à la seconde, des instal­la­tions origi­nales, basées sur un style artis­tique baroque, susci­te­ront la curio­sité des visi­teurs. L’ex­po­si­tion « Nuées et Merveille » mélange allé­gre­ment le symbo­lisme et le surréa­lisme, une tendance très à la mode au XIXe siècle.

Rien ne se perd, tout se recycle, voilà une belle expres­sion que Skall applique depuis fort long­temps. N’y voyez pas de conno­ta­tion écolo­gique mais plutôt un acte artis­tique. Pour ce jeune cinquan­te­naire, tous les objets du quoti­dien pour­raient dispo­ser d’une deuxième exis­tence. L’in­té­ressé prend un plai­sir certain à détour­ner de leur utili­sa­tion initiale les usten­siles rete­nus. Plas­tique, porce­laine ou verre, voire d’autres maté­riaux divers et variés, rien n’échappe à son imagi­na­tion. Il n’hé­site pas à déam­bu­ler dans les marchés aux puces ou à arpen­ter les vide-greniers pour trou­ver du kitch et du strass. Mais atten­tion, sa défi­ni­tion du kitch semble diffé­rente de l’idée que vous pour­riez vous en faire. Il faut signa­ler au passage que durant son enfance, il a vécu à l’étran­ger. L’Afrique d’abord, mais aussi l’Orient puisqu’il a égale­ment résidé en Asie où il s’est impré­gné de la culture locale. «  Au Japon, la notion de kitch n’existe pas  », indique-t-il. «  Ce qu’on pour­rait appe­ler le mauvais goût dans notre pays, c’est juste une façon de mélan­ger les couleurs très voyantes et le genre manga dans les costumes ou même dans les coutumes  ».

Kitch, quand tu nous tiens
Pour se donner une idée du kitch, il suffit de voir à la gale­rie messine « Octave Cowbell » l’ins­tal­la­tion de 96 assiettes déco­ra­tives qui couvrent à la fois une petite partie du sol, du mur et du plafond. Pour les main­te­nir, l’ar­tiste a créé un ingé­nieux système aimanté. Les fiori­tures déco­ra­tives de ces pièces de vais­selle ont de quoi éton­ner le visi­teur et atti­rer l’œil. Entre les dessins pour célé­brer les régions ou les mariages, le visage des papes Jean-Paul II et Pie XII voisine avec celui de Franco, dernier dicta­teur en Espagne, il y a de quoi être décon­te­nancé. Un clin d’œil à la fasci­na­tion  de cet objet présent dans un grand nombre de foyers français, il y a quelques décen­nies. Aujourd’­hui, ils sont relé­gués dans les vide-greniers comme des parias. «  Les assiettes sont à la fois atti­rantes et repous­santes pour les yeux  », déclare un Skall quelque peu amusé par cette mode dépas­sée. Puis il s’in­ter­roge encore à voix haute : «  Est-ce de la déco­ra­tion, de la surdé­co­ra­tionn ou tout simple­ment un objet répul­sif ?  »

Skall, un person­nage haut en couleur
Son person­nage, Skall le façonne depuis une tren­taine d’an­nées. Lui qui roule sa bosse dans le monde de l’art contem­po­rain n’a pas su s’ap­pa­ren­ter à un quel­conque courant artis­tique. D’ailleurs, il déteste les étiquettes. Pour­tant c’est lors de l’ex­po­si­tion de Robert Mala­val à Paris en 1981 qu’il a la révé­la­tion pour cette disci­pline et le mouve­ment «  Pop Art  ». «  Cela a été un tel choc pour moi, je me voyais déjà avec une route toute tracée !  », précise Skall. Son travail semble atypique, voire sortir des sentiers battus. Ses œuvres s’ins­pirent des arts ethniques qui étaient à la mode au XIXsiècle. Orienté vers le symbo­lisme et le surréa­lisme, il aime les pers­pec­tives, les volumes et la géomé­trie. Dans les années 80, lorsqu’il peignait des toiles, il cousait déjà des objets de façon à donner du relief à sa produc­tion. Sculp­ter, fabriquer, filmer ou utili­ser son corps pour des perfor­mances visuelles et éphé­mères, voilà ce qui le gran­dit. «  Comment nommer mon art ? Aucune idée, et ce n’est pas moi de le dire  », voilà, c’est dit.

«  Beau­coup d’ar­tistes ont une ligne histo­rique ainsi qu’une évolu­tion dans leur travail… moi pas !  », assure Skall. Son imagi­naire et ses œuvres lui ouvrent des portes sur des voies qu’il ne pensait jamais pratiquer. À la recherche de lui-même et de son inspi­ra­tion, il respire, telle une bouf­fée d’oxy­gène, l’art contem­po­rain. Cela ne s’ex­plique pas, pour lui, il faut vivre les choses pour les ressen­tir. Il ne prévoit rien si ce n’est d’avan­cer pour évoluer dans ses créa­tions. Si à la fin des années 90, il était impos­sible d’as­so­cier du concep­tuel à du contem­po­rain, à présent, les diffé­rents milieux se combinent et le genre baroque a toute sa place. Toute­fois, il se déve­loppe sans étiquette pour le cata­lo­guer dans un style ou un autre. Seule ombre au tableau pour Skall, la tour­nure que prennent les évène­ments depuis quelques années. «  De nos jours, l’art contem­po­rain devient hermé­tique, élitiste et un peu trop insti­tu­tion­nel à mon goût  », révèle-t-il. Et pour enfon­cer le clou, l’ar­tiste conclut : «  Je dirai même que ça vire à une disci­pline mièvre  ».

L’ex­po­si­tion « Nuées et Merveille » 
À la gale­rie «  Castel Coucou  », c’est un travail très mini­ma­liste qui est présenté avec notam­ment l’œuvre «  Nuées et Merveilles  » repré­sen­tant une jambe fabriquée à base de résine, de verre, de bois et recou­vert d’or 24 carats. À l’in­té­rieur, de la terre sacrée d’Ang­kor, au Cambodge. Le public y verra égale­ment des photos de la perfor­mance effec­tuée pour la Nuit Blanche de 2008 à Paris. Outre d’y voir les assiettes déco­ra­tives chez «  Octave Cowbell  », les visi­teurs pour­ront contem­pler «  Ganga  », une pièce réali­sée avec des capsules de ther­mos qui renferment de l’eau du Gange. Ou encore la «  Porno­gra­phic Story  » qui se compose de céra­mique, de four­rures et de cheveux natu­rels. D’autres produc­tions démon­tre­ront que les marchés aux puces sont des endroits merveilleux, aux sources d’ins­pi­ra­tions diverses. Vous ne verrez plus les objets kitch de votre grenier ou de votre cave de la même façon. Juré !


Article publié le 8 novembre 2011 dans le bimé­dia lorrain La Plume Cultu­relle.

Photo :  ©LPC|JeanVier – L’ar­tiste Skall à côté de l’oeuvre « Ganga », une pièce réali­sée avec des capsules de ther­mos qui renferment de l’eau du Gange, à voir à la gale­rie messine « Octave Cowbell ».


 

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