Projection de 3 000 diapositives à la « Conserverie » de Metz
Pas moins de 3 000 diapositives provenant d’une famille belge vont être projetées jusqu’au 10 novembre 2011 à la « Conserverie » de Metz. Le Conservatoire National de l’Album de Famille propose en quelque sorte un bond dans le passé de la vie d’un photographe amateur prénommé Léon. Le public va découvrir les vacances familiales, les courses cyclistes et les fêtes d’une période révolue allant de 1971 à 1984. Une exposition atypique qui a pu voir le jour grâce aux dons à la structure de ce patrimoine photographique, opérés par Hervé Foucher et Nicolas Valance.
À toutes celles et tous ceux qui ont connu dans le passé les projections privées de diapositives familiales, sachez que la « Conserverie » située à Metz vous en propose une jusqu’au 10 novembre prochain. Découvrez 3 000 images photographiques positives qui caractérisent une période débutant en 1971 et jusqu’à 1984. Que cela concerne la mode vestimentaire, les coiffures, l’environnement ou les poses, il y a fort à parier que pour les plus âgés, le passé va ressurgir. Mais attention, ce n’est pas un artiste ou une personnalité qui a réalisé les prises de vue. Le travail présenté par Anne Delrez, la responsable du Conservatoire National de l’Album de Famille, provient d’un inconnu belge, qui a été prénommé Léon et qui pourrait bien être n’importe qui. « Ici c’est moins ennuyeux à voir car il n’y a personne pour commenter les diapo », observe la fondatrice de la structure. Puis l’intéressée rajoute, quelque peu amusée : « Nous avons aujourd’hui le recul nécessaire pour rigoler du tissu à fleurs ou de tous les objets de cette époque-là. »
Les origines de Léon…
Pour la petite histoire, tout a débuté il y a 10 ans, à Bruxelles sur la Place du Jeu de balles où ont lieu chaque matin les puces. Hervé Foucher, directeur de la galerie messine « Octave Cowbell » et un de ses amis, Nicolas Valance, ont acheté 3 000 diapositives pour à peine 20 euros. « Nous voulions voir à combien le vendeur était prêt à monter dans les enchères pour nous proposer tous ces lots », explique le galeriste. « Nous ne nous doutions pas que nous achetions les diapos de la vie d’une personne, nous pensions que cela provenait du secteur éducatif », renchérit-il. Puis en 2004, l’intéressé propose une exposition qui interroge le public sur le voyeurisme. Les badauds pouvaient regarder depuis l’extérieur, postés aux fenêtres, la projection de treize années de la vie privée d’une famille belge. Léon était né ! « Pour le prénom, nous nous sommes pas foulés », affirme Hervé Foucher, « vu que nous avions acheté les lots en Belgique et que l’environnement des protagonistes semblait être belge, nous avons utilisé le nom d’une enseigne de restauration connue dans le pays. »
D’Octave Cowbell à la Conserverie…
Durant sept années, plus personne n’entendra parler des diapositives de Léon. Rangées dans un coin de placard, il a fallu la création du Conservatoire National de l’Album de Famille, en 2010, par Anne Delrez, pour que Hervé Foucher remette la main dessus. « Maintenant qu’il y a la ‘‘Conserverie’’, je me suis demandé pourquoi les garder. Les lots ne me servent plus à rien », indique le jeune homme qui les cède gracieusement à la structure. A ce jour, pour l’association c’est la première donation en nombre et en couleurs aussi importante. Habituellement, la locataire du 8 rue de la Petite Boucherie ne recevait que des photos en noir et blanc. Concernant l’exposition, qui a débuté le 8 octobre dernier, l’objectif demeure la mise en valeur de la photographie dans un cadre esthétique et présentant un assemblage artistique, et non pas sur le fond. « Nous ne sommes pas des historiennes donc nous ne les exposons pas dans un ordre chronologique », explique Anne Delrez. Aidée pour l’occasion par Sandrine, une étudiante des Beaux Arts de Metz, elle a l’entière liberté de trouver des combinaisons visuelles puisque 80 diapositives sont projetées par jour. Ainsi, entre la visualisation des négatifs, la sélection et le nettoyage, il faut environ 4h00 de travail par thème.
Une exposition / projection étrange ?
Voilà sans doute une manière originale de considérer la photo de famille, non plus comme un instant figé de son propre passé ou de celui de ses proches, mais plutôt comme un documentaire qui apporte son lot d’informations. S’il ne nous concerne pas, nous pouvons être curieux du moment choisi ou des lieux immortalisés. Le public peut donc se moquer, critiquer ou sourire devant ce qu’il voit, dans tous les cas, aucun risque d’une dispute familiale puisqu’il n’existe aucun lien avec l’auteur des prises de vue. Si le côté artistique n’apparaît pas toujours la préoccupation première du photographe, les personnages qui posent dégagent une telle affection qu’on leur pardonnerait tout : leur posture, leur attitude ou leur naïveté. « L’auteur a un regard aimant, et il devait être drôle », indique Anne Delrez qui explique son interprétation du regard de Léon. « Je trouve qu’un réel parfum d’enthousiasme émane de ses clichés. On y voit peu de paysages et peu de photos où ne figure qu’une seule personne. Tout le monde semble heureux et joyeux », insiste-t-elle encore. Justement comment réagissent-ils ? Est-ce la scène qui paraît drôle, ou alors le fait d’imaginer le photographe dans un environnement peu favorable qui amuse les acteurs ? L’adolescente boude-t-elle à cause de la période ingrate de son âge ou alors par principe, fait-elle la tête lorsqu’on la prend en photo ? Autant de suppositions qui laissent l’imaginaire opérer chez le visiteur.
En tous cas, les photos de familles en vacances, de courses cyclables, de fêtes, de sorties en groupe ne vous laisseront plus indifférents après avoir vu la projection des diapositives de Léon. Un conseil pour les prochains clichés : faites attention à votre coupe de cheveux et à votre tenue vestimentaire. Dans quelques années, il y en aura toujours un qui les sortira… et pourquoi pas à la Conserverie ?
Article publié le 19 octobre 2011 dans le bimédia lorrain La Plume Culturelle.
Photo : ©LPC|JeanVier – Projection de 3 000 diapositives familiales à la « Conserverie » de Metz. Le public découvre les prises de vues de Léon sur ses vacances, les courses cyclables, les fêtes et les sorties en groupe du côté de la Belgique.